Transports: « Il faudrait investir 1,2 milliards d’euros d’ici 2030 pour sauver le réseau ferroviaire régional »
Région Aquitaine Limousin Poitou Charente
Publié par renaud.lagrave - le 21/11/2017

Tribune libre à Renaud Lagrave, vice-président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, chargé des infrastructures, des transports et des mobilités. Il alerte sur la situation du réseau ferroviaire de la région

Le réseau ferroviaire de la Nouvelle-Aquitaine s’étend sur 3 226 kilomètres de voies (soit quasiment la distance à vol d’oiseau entre Washington et Los Angeles) et 34 lignes sur lesquelles circulent quotidiennement 700 trains (TGV, Intercités et TER) pour assurer la mobilité des habitants. 53 000 personnes utilisent ce service chaque jour.

La Région n’opposera jamais les trains du quotidien à la grande vitesse. Ils sont complémentaires, les résultats depuis juillet dernier sont là pour en témoigner.

En septembre 2017, la Région vient de récupérer la compétence transport scolaire et interurbain, devenant ainsi une autorité organisatrice de transport de plein exercice.

 » La Région pourra ainsi fixer librement les tarifs sur son périmètre »

Au 1er janvier 2018, elle reprend également les trains d’équilibre du territoire pour les liaisons Bordeaux–Ussel, Bordeaux-Limoges-Guéret et Bordeaux-La Rochelle avec de nouvelles rames. Elle pourra aussi fixer librement les tarifs sur son périmètre en proposant des offres attractives comme elle l’a déjà fait, par exemple, pour les jeunes ou les groupes scolaires.

Les enjeux des assises nationales de la mobilité

Les Assises nationales de la mobilité lancées il y a peu sont l’occasion de se pencher sur les enjeux qui traversent notre nouvelle région. De notre côté, nous avons initié la première conférence permanente de la mobilité et des transports, qui avait réuni l’ensemble des acteurs liés aux transports et infrastructures.

Nous avons aussi souhaité créer un syndicat mixte chargé de coordonner l’action de l’ensemble des autorités organisatrices et de privilégier l’intermodalité entre les modes de déplacement. Fait inédit en France, nous allons proposer une véritable stratégie aéroportuaire régionale pour renforcer l’attractivité des aéroports de notre territoire et donner de la lisibilité à notre action.

"La plupart des lignes en Nouvelle-Aquitaine n'ont pas bénéficié de l'entretien nécessaire de la part de l'opérateur historique et de l'État", estime Renaud Lagrave
« La plupart des lignes en Nouvelle-Aquitaine n’ont pas bénéficié de l’entretien nécessaire de la part de l’opérateur historique et de l’État », estime Renaud Lagrave

Crédit photo : Thibault Seurin

Rappelons qu’avec volontarisme, la Région Nouvelle-Aquitaine a investi plus de 434 millions d’euros dans la régénération des voies (CPER 2015–2020) alors que cela n’entrait pas dans ses compétences ; 515 millions pour renouveler la totalité du parc de matériel roulant et 85 millions depuis 2002 pour rénover les gares, haltes et pôles d’échanges multimodaux.

La situation est alarmante

Comme l’a indiqué Alain Rousset, Président de la Région Nouvelle-Aquitaine, la situation est alarmante. L’audit du réseau, demandé par la Région, montre qu’il faudrait investir 1,2 milliards d’euros d’ici 2030 pour sauver le réseau ferroviaire régional (dont 600 millions avant 2020) et simplement le maintenir en l’état sans amélioration de vitesse.

 » Depuis des décennies, la Nouvelle-Aquitaine a été la grande oubliée de la France ferroviaire »

Depuis des décennies, en privilégiant l’axe rhodanien et malgré l’ouverture du tronçon à grande vitesse Tours-Bordeaux, la Nouvelle-Aquitaine a été la grande oubliée de la France ferroviaire. La plupart des lignes n’ont pas bénéficié de l’entretien nécessaire de la part de l’opérateur historique et de l’État. Certaines n’ont pas fait l’objet de travaux depuis les années 1960.

Les résultats de production se dégradent fortement malgré les remontrances que nous adressons régulièrement à la SNCF. Les ralentissements et les retards s’accumulent. Des tronçons sont menacés de fermeture pour des raisons de sécurité.

Pour préférer le train, il faut que cette solution soit préférable aux autres. C’est-à-dire que la régularité soit assurée, que le confort soit acceptable et que l’inter-modalité soit facilitée.
Si d’autres opérateurs venaient à arriver, ils seraient aussi confrontés à l’état problématique du réseau.

« La priorité aux transports du quotidien ne pourra être réalisée à moyens constants »

À l’issue de la phase de concertation que constituent ces assises, la réalité est claire. La priorité aux transports du quotidien ne pourra être réalisée à moyens constants. Même dans un cadre budgétaire contraint, quoiqu’en disent certains, cela passe donc par des investissements massifs.

S’il n’y a pas de financements supplémentaires pour moderniser le réseau, en explorant peut-être des pistes alternatives comme l’écotaxe poids lourds, alors cette initiative sera vaine et restera une simple opération de communication.

C’est un enjeu d’aménagement du territoire et d’accès à la mobilité pour tous. Ou alors nous aurons tout le temps de regarder passer les trains. Au ralenti, inexorablement.