Henri Emmanuelli : « C’est sûr, un jour, j’arrêterai »
Publié par cedric - le 21/10/2009
ENTRETIEN. De Mont-de-Marsan à Dax en passant par les Régionales, de Darcos à Darrieussecq avec un détour par Atlantisud, le leader du PS landais se régale 

« Sud Ouest ». Geneviève Darrieussecq à la tête de la Communauté d’agglomération du Marsan, ça vous inspire quoi ?

Henri Emmanuelli. Si on met de côté les histoires de personnes, qui sont plutôt lamentables, je constate qu’on a inversé le suffrage universel. Les électeurs de la CAM n’avaient pas voté pour faire élire une présidente qui a appelé à voter Sarkozy. Pour arriver à cette malversation électorale, je pèse mes mots, on n’a pas hésité à multiplier quasiment par 2 le nombre de postes rémunérés. En 30 ans de vie politique, je n’ai jamais eu à pratiquer l’achat de voix. Entendre prononcer des accusations comme « tordu » ou « dinosaure », à défaut d’avoir du souffle, je trouve que ça ne manque pas d’air.


Vous pensez que le débat a été « pollué » par des promesses ?

Je ne suis pas le docteur Watson, mais je constate. J’ai un peu de mal à croire à un scénario « spontané »… Moi, je suis pour la transparence et la loyauté, pas pour les arrangements au deuxième degré. Je l’ai prouvé en démissionnant deux fois, en 1993 et 1997 (de sa fonction de député, Ndlr) pour respecter le suffrage universel.


Geneviève Darrieussecq a récemment relancé la question du doublement de la rocade de Mont-de-Marsan, qu’en pensez-vous ?

Tout d’abord, les caisses du Département ne sont pas ouvertes par simple interpellation publique. J’aurais aimé en parler avec Madame le maire de Mont-de-Marsan. Le Conseil général a fait une proposition, il y a environ un an, à la CAM en parlant de choix à faire entre la 2 x 2 voies du Caloy et la rocade. Compte tenu de ce que sont les finances du Département, nous devrons arbitrer entre ces deux options. Quant aux contrats d’agglomération, ils ne sont pas « revolving » ! Le Département n’est pas un fonds de concours qui viendrait en renfort de financements qui seraient décidés par d’autres et ailleurs. Aujourd’hui, l’État nous doit 42 millions d’euros, auquel il faut rajouter entre 15 et 20 millions d’euros que nous avons perdus dans la recette des droits de mutation. Alors si Madame Darrieussecq peut interpeller le  »génie » du faubourg Saint-Honoré à ce sujet, elle a tous mes encouragements… D’autant que si se réalise ce qui est en train de se préparer, on n’aura même plus assez d’argent pour financer nos propres compétences.


Vous parlez réforme de la taxe professionnelle, où en est-on ?

On ne sait pas où on va. Le rapporteur général en est réduit à faire un amendement de 106 pages et à nous promettre les premières simulations pour janvier… On va voir comment se déroule le débat à l’Assemblée, mais ce qu’on a compris pour l’instant, c’est : « On ne peut rien vous dire tant que le chef n’a pas décidé ». Au bout du bout, l’aide aux communes ne faisant pas partie de nos compétences obligatoires, ce sont elles qui vont trinquer.


Dans ces conditions, que devient le budget du Conseil général ?

Nous allons probablement devoir diminuer de 10 % les subventions de fonctionnement et les règlements départementaux. Différer également la construction de deux collèges, à Labenne et Saint-Geours-de-Maremne. Et nous serons obligés d’augmenter de 5 % la fiscalité, alors que nous n’y avions pas touché depuis 2006.


La coulisse s’agite beaucoup autour du projet Atlantisud, qu’avez-vous à en dire ?

Depuis 2004, il est prévu que 30 ha sur les 300 du projet soient réservés à une surface commerciale. Normalement, ça ne devrait surprendre personne. Comme le fait que la Macs (Communauté de communes de Maremne Adour Côte Sud) compte aujourd’hui 55 000 habitants, autant que l’agglomération dacquoise. Nous avons fait faire des études précises et nous savons que les Landes perdent entre 370 et 400 millions d’euros de transactions commerciales au profit du BAB (Bayonne-Anglet-Biarritz, qui en rafle 50 %), de Pau ou de Bordeaux. Tout cela parce que manquent une cinquantaine de marques dans notre département. Parallèlement, il est facile de constater la présence massive et même la surreprésentation de certaines surfaces commerciales sur notre sol… Je trouve que des gens s’agitent beaucoup dans la coulisse et qu’il y a eu, par exemple, beaucoup moins de concertation au moment de l’implantation du Grand Mail à Dax.


Qu’allez-vous faire pour convaincre les sceptiques ?

J’ai proposé de rencontrer rapidement les commerçants dacquois pour en parler. Ce devait être ce lundi. L’invitation a été finalement déclinée et repoussée. Je constate que quand c’est du privé qui agit, on ne demande rien, alors que quand l’initiative est publique, il y a beaucoup d’émoi. Il y a un millier d’emplois créés dans la balance, qui peut cracher dessus ? Nous sommes prêts à informer, à associer tout le monde à la réflexion, mais il serait regrettable que certains veuillent créer un rapport de forces car nous, nous n’irons pas à Canossa sur le sujet.


Les Régionales approchant, comment s’y prépare le PS ?

Je pense que toute la gauche aurait intérêt à partir rassemblée au premier tour. Je ne sais pas ce que vont faire les Verts, mais je souhaite qu’ils soient avec nous. Alain Rousset et son équipe, Jean-Louis Carrère en tête, ont vraiment fait du bon travail pour l’Aquitaine. Ils ont été une formidable locomotive pour notre région et je ne vois pas ce qu’on pourrait leur reprocher. Quant à M. Darcos, c’est vraiment un très bon candidat pour l’UMP, je n’aurais pas fait mieux…


Pourquoi ce choix vous convient tant ?

D’abord, on l’a déjà vu la fois précédente ! Et puis il pourra faire campagne le dimanche, puisqu’il veut faire travailler tout le monde ce jour-là. Il va aussi arriver avec un regard bienveillant de tout le corps enseignant (il rit). Et comme on lui a déjà promis que, s’il était battu, il resterait ministre, ce n’est pas sûr qu’il veuille vraiment gagner. Enfin, il faut bien qu’il rende service. Ah et puis il y a M. Laporte aussi ! Ils peuvent le mettre où ils veulent, mais ça a l’air de coincer. De toute façon, ce n’est pas eux qui vont choisir : arrivera un oukase pour trancher…


De votre côté, un murmure fait de vous un candidat aux Sénatoriales en 2011 ?

Oulala ! J’ai déjà entendu ça il y a 20 ans. Pour l’instant, je suis député jusqu’en 2012. Quant à savoir ce qu’il adviendra après… Mais c’est sûr, un jour, j’arrêterai.

 

L’après-Klaus : « On se fout de nous »

« Sur le bois, on peut dire que le plan Barnier a échoué. On nous avait dit : on va sortir de la crise par le marché. Or, non ! Au 12 octobre, le taux de remplissage des aires de stockage est de 30 %. Et tout ce qui n’est pas stocké à ce jour… »

« Et puis sur 600 millions de prêts bonifiés annoncés, aucun fonds n’a été débloqué, tout cela parce que les garanties demandées par l’État sont bien trop compliquées pour que les banques s’engagent. »

« Après, ERDF a fait un effort pour enterrer les lignes, mais c’est insuffisant. Quant à France Télécom, j’ai écrit à tous les maires du département pour faire un état des lieux précis sur leur commune. Avec cela, je reviendrai vers France Télécom pour savoir jusqu’à quand on va se foutre de nous ! »

Auteur : Recueilli par jean-françois renaut et Jean-pierre Dorian