Littoral aquitain : comment lutter contre l’érosion
GIP littoral Aquitain
Publié par cedric - le 18/09/2012

La politique régionale vient d’être dévoilée. L’appui du ministère va maintenant être sollicité.

 

Le 1er octobre prochain, Renaud Lagrave, le président landais du Groupement d’intérêt public (GIP) Littoral franchira la porte du ministère du Développement durable pour y être reçu par un conseiller de Delphine Batho, la ministre en exercice. Au menu : l’érosion marine sur la côte aquitaine et les moyens d’y remédier.

Il y a quelques années, le recul du trait de côte était encore un sujet confidentiel, appréhendé par les seuls riverains et élus locaux confrontés au travail de sape des vagues. Il est devenu un enjeu régional au rythme des lourds travaux de confortement menés sur les falaises basques, de l’effondrement de pans entiers de dune sur les plages océaniques de La Teste-de-Buch (33), ou encore du périlleux rapproché d’un immeuble d’habitation (Le Signal) en bordure de plage, à Soulac-sur-Mer (33). Au nord de l’estuaire de la Gironde, sur la côte charentaise, l’érosion est également un souci majeur, qu’il s’agisse de la pointe de la Coubre et de son phare, promis tôt ou tard à l’engloutissement, ou de la conche des Baleines, dans l’île de Ré.

 

Sur les quelque 275 kilomètres de la côte aquitaine, le GIP Littoral a pris le sujet à bras-le-corps dès 2009. Il a saisi le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l’Office national des forêts (ONF) et l’Observatoire de la côte aquitaine pour évaluer scientifiquement le phénomène. Les conclusions des trois organismes ne laissent aucune place au doute. L’érosion fait reculer la côte sableuse de 1 à 3 mètres par an, avec des pointes à 6 mètres. Elle grignote les falaises basques à un rythme évalué à 20 centimètres par an. Le danger ne va pas s’estomper par magie. L’élévation du niveau moyen des océans sous l’effet du réchauffement climatique devrait plutôt l’intensifier dans les décennies à venir.

 

« Une boîte à outils »

Partant du principe que lutter chacun dans son coin contre les ravages de l’océan ne servait à rien – sinon à repousser les problèmes chez les voisins -, le GIP Littoral s’est attaché à définir une stratégie régionale de gestion du risque à échéance 2020 et 2040. Renaud Lagrave en a présenté les grandes lignes hier à l’hôtel de région, à Bordeaux.

L’épais document rédigé pour l’occasion s’inscrit dans la stratégie nationale, inspirée pour partie de l’exemple aquitain et dévoilée en mars dernier à Paris. Il tire les leçons de trois expériences pilotes menées depuis un an à Ciboure, sur la Côte basque, à Contis, dans les Landes, et à Lacanau, dans le Médoc. À Ciboure, le recul de la falaise rocheuse de Socoa (de 25 mètres à 50 mètres depuis 1882) menace à la fois la pérennité du port et celle du fort. À Contis, l’érosion risque de gagner par le « courant », ce petit fleuve côtier qui se fraie un chemin à travers la dune. À Lacanau, le front de mer se dirige tout droit vers l’émiettement, malgré les épis et les enrochements.

Même si le mot « relocalisation » est régulièrement employé pour les logements et les commerces en première ligne à Lacanau-Océan, « la stratégie régionale n’est pas une stratégie du repli. Cette question n’est plus un tabou, mais l’immense majorité du trait de côte aquitain sera traitée par d’autres moyens, et d’abord par des moyens doux comme la végétalisation des dunes », insiste Renaud Lagrave.

Pour le président du GIP Littoral, cette stratégie est d’abord « une boîte à outils » à destination des élus locaux : prévenir les problèmes par le biais des documents d’urbanisme (plans de prévention des risques naturels, schémas de cohérence territoriale), définir finement le risque érosion à l’échelle de leur bande côtière, étudier les solutions techniques, communiquer en direction de la population, etc. Des collectivités locales ont déjà enclenché le processus, sur la Communauté de communes de la pointe du Médoc, à Mimizan et sur la Côte basque.

 

Lacanau, La Teste, Labenne

Pour trois communes aquitaines, cette stratégie a une dimension très concrète. Soutenues par le GIP Littoral, Labenne, dans les Landes, La Teste-de-Buch et Lacanau, en Gironde, ont répondu à un appel national à projets sur la relocalisation des biens et des activités. À Labenne, il s’agirait de reculer à terme les équipements qui ont à voir avec la plage : le poste de secours et des commerces. À La Teste, le problème est plus épineux. Il se concentre sur trois campings au pied de la dune du Pilat. « Ils devraient être avalés dans les 20-25 ans. Il nous faut les relocaliser dans une commune dont 92 % du territoire est classé, qu’il s’agisse de la loi littoral ou de Natura 2000 », résume Patrick Davet, l’adjoint aux travaux de la mairie de La Teste. Ces campings emploient plusieurs centaines de personnes en saison.

À Lacanau, dont le maire, Jean-Michel David, est l’un des premiers élus à avoir eu le courage de parler de « repli », il faut imaginer la mutation du front de mer, qui est aujourd’hui encore son premier atout touristique. « L’idée n’est pas de fermer les commerces ou de les envoyer à Reims ! Il s’agit bien de relocaliser pour poursuivre l’activité », insiste Renaud Lagrave. Mais tout reste à inventer sur ce thème. Et notamment les mécanismes de financement, dans une période où l’État épouse les traits d’Harpagon. Pour l’heure, le fonds Barnier de prévention des risques naturels majeurs ne comporte aucun volet « érosion marine ». Parce que le phénomène est lent et prévisible. C’est le drame des copropriétaires du Signal, à Soulac-sur-Mer.

Il va bien falloir trouver une solution. Nul doute que Renaud Lagrave abordera ce casse-tête le 1er octobre, lors de son rendez-vous au ministère.